L’Etat Mauritanien vient d’honorer la communauté de la Faydah Tijaniyyah de Cheikhal Islam à travers la personne du défunt Khalife de Baye Niass, en rebaptisant l’une des plus grandes avenues de sa capitale Nouakchott au nom d’El Hadj Abdoullah Ibrahim Niass.
Au-delà de Medina Baye, c’est le Sénégal et l’Islam qui ont été honorés à travers un de ses valeureux fils.
Sur les pas de son illustre père et maître spirituel, ce fils prodige du Sénégal fut l’un des grands hommes de Dieu qui marqua de son empreinte indélébile l’histoire de la Daa’wa (prédication islamique) aussi bien à l’intérieur du pays qu’au-delà des frontières sénégalaises, pour avoir participé à de nombreuses rencontres des Organismes Islamiques Internationaux sous la conduite éclairée de son père Cheikhal Islam.

En choisissant ainsi d’immortaliser le nom de cet éminent érudit et défenseur de l’Islam, l’Etat Mauritanien a surtout posé un acte de haute portée diplomatique et religieuse, par lequel il rend non seulement un grand hommage à la famille de Baye Niass (longtemps considérée comme un pont de rapprochement entre les peuples mauritanien et sénégalais), mais vient également consolider les excellentes relations séculaires et multidimensionnelles entre la Mauritanie et le Sénégal.
A ce propos, le Cheikh Al Islam, lors d’une de ses visites en Mauritanie en 1967, avait déclaré dans son discours que le Sénégal et la Mauritanie constituent un seul peuple.
Aussi faut-il souligner que Chef de l’Etat mauritanien et son gouvernement sont sans doute soucieux d’exprimer, à travers cet acte symbolique, un sentiment de gratitude envers Médina Baye pour son assistance et son soutien constant en faveur du raffermissement des relations sénégalo-mauritanienne ainsi que son appui inconditionnel aux ressortissants mauritaniens du Sénégal, en toutes circonstances, y compris dans les moments de crise. C’est ainsi que le dernier acte posé en ce sens reste l’acte de générosité de la Fondation « Fonds Médina Baye », sur instruction de l’actuel Khalife de Cheikh al Islam, à l’endroit des mauritaniens bloqués à la frontière sénégalo-mauritanienne de Rosso et durement impactés par le Covid19, rappelant à plusieurs égards les événements tragiques sénégalo-Mauritanien de 1989 lors desquels El H Hadj Abdoullah Ibrahim joua un rôle historique et diplomatique de premier plan .
Ce noble acte posé par les autorités mauritaniennes à l’endroit d’El Hadj Abdoullah peut être considéré sans aucun doute comme un hommage au Cheikh Al Islam qui a d’une part jeté les bases des excellentes relations entre Médina Baye et Mauritanie et d’autre part façonné son fils et mis son pied à l’étrier.
Ainsi donc, évoquer la vie de Cheikh Abdoullah NIASS à travers cet acte symbolique des autorités mauritaniennes, devrait nous permettre de jeter un bref aperçu sur sa jeunesse et sa formation, de revenir sur les relations privilégiées avec son vénéré père et guide spirituel, avant de passer en revue le rôle historique qu’il a eu à jouer dans la diffusion du véritable message de l’Islam sous la direction de Mawlan Cheikhal Islam qui l’a très tôt responsabilisé dans les missions à l’intérieur du Sénégal tout comme dans le monde arabo-islamique (dont la Mauritanie), à l’image de certains autres collaborateurs du détenteur de la Faydah Tijaniyyah.
- VIE DE CHEIKH EL HADJ ABDOULAYE IBRAHIM NIASS

Né vers 1928-1929 à KAOLACK, il connut une enfance caractérisée par une santé fragile ; raison pour laquelle son père écrivit à certains de ses grands Muqaddam (Lieutenants), leur demandant de prier pour le jeune Abdoullah pour qu’Allah le préserve et lui accorde une longévité, avant de préciser dans ces dites lettres que la survie de ce nouveau-né serait sans nul doute bénéfique pour l’humanité.
Il débuta très tôt son apprentissage du Saint Coran auprès son père qui l’envoya auprès de l’enseignant Mauritanien du nom de Mohamed Ould Rabani auprès de qui il mémorisa presqu’entièrement le Coran avant de le parachever auprès de son oncle Al Hadji Astou. Après la mémorisation du Saint Coran, El Hadj Abdoulah Ibrahim NIASS débuta ses études exotériques auprès de Cheikh Seydi Ousmane NDIAYE avant de les poursuivre avec Cheikh Seydi Ali CISSE. et de les achever auprès de Cheikh Ibrahim Niass. Il étudia auprès de son père les sciences de la « Balaga », (Rhétorique) de la Nahwou (Grammaire Arabe), les sciences des Hadiths avec tous ses démembrements, ainsi que la science du Tafsir.
Sur le plan Esotérique, Cheikh El Hadj Abdoulah Ibrahim NIASS prit la Tariqa Tidjaniya des mains de son père. Plus tard il prit les litanies de la Tarbiya (initiation gnostique) de Cheikh Ibrahim NIASS avant de l’achever auprès de Cheikh Seydi Ali CISSE.
- LE DISCIPLE DE SON MAITRE
Cheikh Ibrahim NIASS était un véritable guide pour tous, y compris ses enfants et plus particulièrement pour le premier d’entre eux. Il contrôlait minutieusement leurs cursus scolaires dans les moindres détails et s’assurait quotidiennement de leur assimilation parfaite des enseignements. Il mit beaucoup d’énergie à former son fils aîné en la personne d’El Hadj Abdoulah convaincu que son exemple ferait tâche d’huile à l’endroit de ses cadets. EL Hadji Abdoulah se hissa à la hauteur des ambitions de son illustre père et maître, devenant ainsi le meilleur de sa génération et les écrits de son père l’attestent. Ce dernier le qualifiait d’ailleurs de savant émérite.

- RAPPORT ENTRE UN HOMME D’ETAT ET SON SERVITEUR
Cheikh Ibrahim NIASS fut un Homme d’état et un diplomate achevé. S’il a pu réaliser autant de prouesses diplomatiques c’est par ce qu’il avait à ses côtés des serviteurs émérites et rompus à la tâche, de la trempe d’El Hadj Abdoullah qu’il a lui-même formé. La revue des correspondances entre les deux hommes dénote des rapports étroits qu’ils entretenaient et de la place qu’El Hadj Abdoullah occupait auprès de son père. Il était à la fois le véritable Chef de Cabinet et le Premier Ministre de la Galaxie Organisationnelle de Cheikh Ibrahim NIASS qui, dans son organisation méthodologique n’avait rien à envier à un Chef d’Etat.

Cheikh Ibrahim NIASS avait entière confiance en son fils aîné à qui il confiait de très grandes missions, qu’elles soient familiales, sociétales et même internationales. Il était le véritable Chef de famille, chez qui tout ce qui avait rapport au père convergeait. Il s’occupait de l’éducation et de l’encadrement de ses jeunes frères, à l’intérieur comme à l’extérieur du Sénégal. Il était à la tête de la mission de mise sur pied d’un système éducatif moderne à Kaolack, sous la direction éclairée du Cheikh Ibrahim NASS. C’est ainsi que le jour de l’inauguration de l’institut El Hadj Abdoulaye NIASS (Nom du père de Cheikh Ibrahim NIASS), Cheikh Ibrahim NIASS les remercia lui et Oustaz Ibrahim Mahmoud DIOP en les qualifiant : « des jeunes l’ayant soutenus à l’intérieur comme à l’extérieur » dans la réussite de la mise sur pied de l’Institut.
Du point de vue du pèlerinage à la Mecque et qui tenait à cœur le Cheikh Ibrahim NIASS, El Hadj Abdoullah était le convoyeur en chef des pèlerins de son père. Ce dernier l’envoyait très souvent en mission auprès des Chefs d’Etat, des rois, des Leaders Religieux et Coutumiers et j’en passe. Cheikh Ibrahim NIASS dans ses écrits disait par ailleurs : « qu’il avait fait de lui (Cheikh Abdoullah) son véritable dépositaire et représentant dans tous les domaines ».
- ROLE DE CHEIKH EL HADJ ABDOULAYE IBRAHIM NIASS DANS LES RELATIONS SENEGALO-MAURITANIENNES ET PLUS PARTICULIEREMENT DANS LES EVENEMENTS DE 1989.
Les relations entre la famille de Cheikh El Hadj Abdoulaye NIASS (père de Cheikh Ibrahim NIASS) et la Mauritanie, son des relations circulaires, mais elles prirent une autre dimension avec l’avènement de Cheikh Ibrahim NIASS dans les années trente 30. En effet, c’est durant cette période que la crème de l’intelligentsia (savante et noble) de la Mauritanie fit acte d’allégeance à la « FAIDHA » (mouvement de revivification de l’Islam et de la Tidianiya annoncée par Cheikh Ahmed Tidiane Chérif). Ainsi, des milliers de mauritaniens effectuèrent depuis lors des voyages entre la Mauritanie et Kaolack pour s’abreuver de la source intarissable de la FAIDA . Certains s’y établirent de façon définitive.
Cheikh Ibrahim NIASS avait fait du brassage ethnique, social et culturel un élément de sa DA’WAH et la Mauritanie prit certainement la part la plus importante. Ainsi de part et d’autres le brassage était total et des membres de la famille de Cheikh Ibrahim NIASS s’installèrent à leur tour en Mauritanie par des liens matrimoniaux, renforçant l’intégration des peuples africains prôné par le Cheikh Al Islam.

Si les relations entre le Sénégal et la Mauritanie sont toujours au beau fixe, El Hadji Abdoullah y a joué un rôle majeur lors des évènements tragiques de 1989. En effet, il fut de Medina Baye un havre de paix et un refuge pour les milliers de mauritaniens du Sénégal en proie à des menaces et des persécutions. Médina Kaolack devint ainsi un lieu de sécurité pour eux et leur biens. Et c’est ici que se révéla la véritable dimension de Cheikh Abdoullah NIASS.
Il prit ainsi fait et cause pour les ressortissants mauritaniens à qui il accorda tous les privilèges, ouvrit les portes de Médina Kaolack, ordonna l’accueil et le partage des logements, des biens et autres nutritions avec le peuple mauritanien frère. Il ouvrit la grande mosquée et tous les lieux Publics aux ressortissants mauritaniens. Face aux menaces qui devenaient de plus en plus persistantes pour troubler la quiétude des réfugiés mauritaniens, il organisa d’une main de maître leur protection, sans aucune forme de concession qui pourrait ternir l’image de Médina Kaolack comme lieu de refuge de toute personne indigente quel que soit sa race ou sa nationalité.
Les sinistrés mauritaniens restèrent donc en toute quiétude à Médina et furent tous rapatriés sains et saufs en Mauritanie par le Khalif El Hadj Abdoullah à la tête d’une délégation conduite conjointement par un de ses frères et son fils aîné.
Babacar Abdoullah NIASS