
La situation mondiale actuelle donne matière à réflexion sur des sujets d’ordre
prospectif dans le champ politique, social et économique. Notamment la posture des
musulmans dans la construction du nouveau monde compte tenu du fait que le
monde se dirige vers un nouvel ordre. C’est pourquoi, le corps de cette réflexion se
constitue de trois points principaux : l’état actuel de la pandémie, le monde postcovid-19, et le rôle des musulmans dans la configuration d’un nouveau monde.
L’ETAT ACTUEL DE LA PANDEMIE
Le monde est profondément atteint en termes de perte de vie humaine. En
guise d’exemple, le nombre de décès s’articule actuellement autour de (400 000). Et
les grands pays sont les plus touchés : la France compte plus de (28 000) décès,
l’Espagne (27 000) décès, l’Italie plus de (32 000) décès, les Etats-Unis plus de (104
000) décès, et le Brésil plus de (27 000) décès. Quant à l’Afrique est au bas de
l’échelle en comptant environ (3 000) décès. Et en ce qui concerne l’aspect
économique, l’impact est universel. Et selon les experts, la récession pourrait
atteindre jusqu’à 70% concernant les profits économiques à cause du ralentissement
des secteurs les plus déterminants dans l’économie mondiale, en l’occurrence
l’industrie, l’aviation, le tourisme. En conséquence, l’activité économique, dans
plusieurs pays, est à l’agonie ; et les travailleurs sont sacrifiés à l’autel de la survie
des boites. Par exemple, aux Etats-Unis, plus de 20 millions de travailleurs ont perdu
leurs emplois. Et en ce qui touche l’aspect social, les mesures prises pour contrer la
propagation du virus, tels que le confinement et la quarantaine permettent à
l’individualisme d’asseoir son autorité. Et sur le plan religieux, le COVID-19 n’a
pas eu de la pudeur pour dépouiller le vieil homme en lui : beaucoup de symbole de
la Religion sont relégués au confinement. Par exemple, la Kaaba, la Mosquée du
Prophète (Psl), ainsi que beaucoup de lieux de culte ont été fermés. Même avec la
réouverture décrétée dernièrement n’est pas dépourvue de mesures barrières, telle
que la distanciation physique de sorte que certains aspects de la prière collective (le
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rapprochement des fidèles…) reflétant le sens que l’Islam lui accorde perdent leur
lueur. Donc, les conséquences, tous azimuts, sont à foison.
LE POST-COVID-19
Le monde après COVID-19 fait l’objet de prédilection des chercheurs et
analystes, surtout dans le domaine des études stratégiques et prospectives étant
donné que le basculement vers un Nouvel Ordre Mondial (NOM) est inéluctable.
C’est-à-dire, une nouvelle mode de vie suivant l’exemple de l’histoire de
l’humanité : au lendemain de chaque évènement mondial déterminant, une nouvelle
mode s’impose ; puis s’en suive un nouvel ordre. Et nous en trouvons l’illustration
dans toutes les phases de l’histoire humaine, depuis la Préhistoire comprenant toutes
ses grandes périodes : le Paléolithique (l’âge de la pierre taillée), le Néolithique
(l’âge de la pierre polie), et le Mésolithique (l’âge transitoire entre le Paléolithique
et le Néolithique), jusqu’à l’apparition des premiers documents écrits. Au sujet de
l’histoire moderne, au XVIIᵉ siècle plus précisément au lendemain de la Guerre de
Trente Ans (1618-1648) – causée de multiples facteurs, mais l’aspect religieux y fut
plus patent : les catholiques versus les protestants- un (NOM) fut mis en place ayant
statué le divorce entre le pouvoir politique et l’Eglise après avoir mis cette dernière
au banc des accusés par rapport à son rôle décisif sur le retard du continent européen,
son rapport négatif avec le savoir, et son système d’exploitation des gens. Par
conséquent, l’ordre prôna la liberté ; et la révolte contre l’Eglise. Une tendance qui
a caché la baraque au Clergé, comme l’adage de Jean Jaurès le prouve : « Nous
voulons un monde sans Dieu ». Ce qui constitue un pilier primordial de la
civilisation occidentale sous forme de deux éléments : l’athéisme et l’immoralité.
Dans le même sillage, à la suite de la Première Guerre mondiale (1914-1918),
la mise à jour du système international s’est effectuée sous forme d’une organisation
multilatérale à l’échelle internationale : ‘’Société des Nations’’, sous l’égide des
pays vainqueurs de la guerre étant en charge de la modélisation de la scène
internationale. Etant dans les choux, ce mort-né a cédé la place, à cause de la
Deuxième Guerre mondiale (1939-1945), à son rejeton : ‘’Nations Unis’’, en charge
de la mise sur pied un environnement de paix et de sécurité dépourvu de guerre et
de violence. Mais, la genèse de cette organisation pose malheureusement des
problématiques structurelles, en l’occurrence le droit de veto adjugé aux membres
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permanents du Conseil de la Sécurité. Par exemple, une multitude innombrable de
résolutions, à l’encontre d’Israël, est bloquée par le véto états-unien. En
conséquence, Israël perpétue ses actes d’agression contre le peuple palestinien.
Cependant, Nations Unis a cordonné plusieurs reprises des interventions militaires
contre des pays ‘’transgressant’’ ses résolutions adoptées, ou des entités au nom du
maintien/restauration de la paix et de la sécurité. Et cette justice de deux poids deux
mesures a participé au déclenchement de tant de calamités qui gangrènent la paix et
la sécurité internationales, tels que les guerres et les conflits. Et à la suite de sa
création, le monde s’est absorbé dans un système bipolaire sous l’ombre des EtatsUnis et de l’Union soviétique jusqu’à la Chute du mur de Berlin (1989). Et la scène
internationale a pris une autre tournure : l’unipolarité sous l’hégémonie américaine
en considération d’américaniser, politiquement, culturellement, économiquement le
globe à l’aide de la mondialisation.
Pour ce qui est de la mondialisation, elle va remettre de l’ordre dans ses
vêtements après le COVID-19 dans la mesure où elle prônait un village planétaire
conjoint au profit de tout le monde, même si l’élan n’affranchissait guère le stade
théorique. Parce que, les pays font recours au repli sur soi : le confinement. L’intérêt
national prime sur toute autre considération ; et le devenir collectif relégué aux
oubliettes. Ce qui ne manque pas de conséquences fatales tous azimuts. Et ceci
occasionne un (NOM) régi de nouveaux mécanismes. Une assertion qui fait
quasiment l’objet d’unanimité dans le cercle des penseurs, stratèges, philosophes,
hommes d’affaires et élites politiques. Le penchement est perceptible ; donc le
changement vers un nouveau monde sera inévitable. C’est pourquoi, le réveil sera
brutal pour ceux qui ne songent pas à quelle manière participeront-ils à la
construction du monde de demain, particulièrement les musulmans.
En fait, les conséquences sont déjà au rendez-vous. Alors, la question se pose
maintenant sur les objets du changement, et quelle attitude à y adopter. Sur le plan
politique, le changement se pencherait vers la centralité de l’Etat. C’est-à-dire, l’Etat
va conforter son pouvoir et sa domination au vu de la politique occidentale basé sur
le slogan : ‘’moins Etats, mieux Etats’’, au nom de la démocratie et de la liberté en
les enjoignant aux autres parties du globe. Comme le statuquo l’atteste, beaucoup de
parlements ont adopté des lois permettant à l’exécutif de renforcer son pouvoir
décisionnel au détriment des libertés individuelles dans l’intention de lutter contre
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l’infiniment petit : le virus. Une dualité qui enfermerait les Etats dans un dilemme.
C’est-à-dire soit la force de l’Etat, soit les libertés !
Et sur le plan sanitaire, le changement n’exemptera guère les systèmes de
santé. Car, les systèmes les plus sophistiqués, encensés du pupitre de tout le monde,
se sont engloutis dans le virus. C’est le cas de l’Italie et de la France. Le COVID-19
a découvert le nœud de l’intrigue : l’illusion de la disponibilité de l’aspect matériel
et personnel, c’est-à-dire les hôpitaux, l’équipe et plateau médicaux. Insuffisant !
Car, l’aspect stratégique, prospectif et moral par rapport aux futures maladies à
caractère endémique/pandémique, doit être accordé un rang décisif en pyramide des
priorités sanitaires. Et au niveau de l’Afrique, la tendance des évacuations sanitaires,
surtout chez les dirigeants politiques, doit être mise en question dans le but de
renfoncer les allocations du secteur sanitaire, mettant en place des infrastructures de
qualité avec un personnel sanitaire qualifié et suffisant conformément à l’attente des
populations.
En ce qui concerne le volet social, le désastre est éminent à cause d’un système
social à caractère matérialiste. C’est-à-dire, le matérialisme constitue le suc
substantiel de la société occidentale. Ce qui relègue les valeurs typiquement
humaines dénuées de tout intérêt matériel au second plan, que ce soit sur le plan
individuel ou organisationnel/étatique. Le phénomène le plus illustratif consiste en
le traitement réservés aux séniors confinés perpétuellement dans les maisons de
retraite sans aucune attention particulière. Une attitude justifiée par la passivité de
cette tranche d’âge : une lourde charge sur la population active. Ce qui a accentué la
vulnérabilité de cette couche laissée en rade. Contrairement aux valeurs de l’Islam
qui magnifient l’honneur de l’être humain sans tenir compte des considérations
âgistes, raciales ou linguistiques, « Certes, Nous avons honoré les fils d’Adam »,
(Coran : 17/70). Et les pages de l’histoire nous rapportent un jeune homme portant
sa mère sur ses épaules pour lui permettre d’effectuer la circumambulation
(Tawāf)… et Ibn Omar en l’interpellant sur l’identité de la vielle, il dit : « C’est ma
mère ! c’est son neuvième pèlerinage sur mes épaules. J’espère bien que je
m’acquitte après lui avoir dû une fière chandelle ? », et Ibn Omar lui répond qu’il
est malheureusement assujetti, à jamais, aux redevances à l’égard de sa mère. C’est
ça la conception de l’Islam contrairement à l’approche occidentale qui met
l’humanité et la moralité à l’écart au profit de l’athéisme et de l’immoralité. Ce qui
ouvre une brèche vers l’attitude à adopter après le COVID-19.
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LE ROLE DES MUSULMANS DANS LA CONFIGURATION D’UN
NOUVEAU MONDE
L’avènement de COVID-19 s’agit d’un oiseau rare pour réaménager la sphère
islamique par le biais d’une série de réformes : recours à la centralité de l’humanité,
la négation du matérialisme, usage des nouvelles technologies de l’information et de
la communication (TIC), établissement de mécanismes en charge des études
prospectives et d’élaboration de réponses adéquates aux questions d’ordre moderne.
Premièrement – la centralité de l’humanité :
L’être humain est le noyau de l’existence terrestre, tout s’articule autour de
lui du fait de son rôle prépondérant sur terre en tant que Représentant de son
Créateur, « Je vais établir sur terre un Représentant », (Coran : 02/30). Et ce
Représentant est honoré et magnifié (voir Coran : 17/70). Alors, cette responsabilité
et cet honneur doivent se refléter dans toute action administrée par l’être humain. Et
le code de conduite d’une telle démarche s’identifie au verset 41 de la sourate 22 :
« Ceux qui, si Nous leur donnons la puissance sur terre, accomplissent la Prière,
acquittent l’aumône, ordonne le convenable et interdisent le blâmable. Cependant,
l’issue finale de toute chose appartient à Dieu ». Ce qui symbolise trois
responsabilités à deux niveaux :
1- La responsabilité cultuelle au niveau de la relation verticale entre l’être
humain et son Seigneur. Et cette responsabilité se manifeste dans la
prière… ;
2- La responsabilité sociale, à caractère économique, au niveau de la relation
horizontale entre l’être humain et son prochain. Et cette responsabilité se
manifeste dans l’aumône (structurel) ;
3- La responsabilité morale, au niveau de la relation horizontale, se
manifestant dans l’ordonnance du convenable et l’interdiction du blâmable
en considération d’être actif et utile : la réforme continuelle ;
Donc, toutes ces responsabilités doivent être prises en compte dans la
construction d’un (NOM) pour que la considération humaine soit au cœur de
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toute décision prise à l’échelle individuelle ou institutionnelle. Résultat : la
paix et la prospérité.
Deuxièmement – la négation du matérialisme :
Ce statuquo de mauvais augure trouve ses racines dans le standard du
monde moderne : le matérialisme. Tout s’y rapporte au matériel : argent,
luxe/luxure. Tout s’articule autour de l’égo. Les valeurs humaines cardinales
bafouées : le savoir, l’éthique, la piété. Et cet égoïsme explique tous les maux
gangrénant notre quotidien : les guerres, les conflits, les tensions,
l’exploitation des autres, la pauvreté… la liste n’est pas exhaustive. Donc, il
est temps de mettre l’être humain au-dessus de la matière, boostant les valeurs
qui magnifient l’existence humaine.
Troisièmement – l’usage des nouvelles (TIC) :
Le COVID-19 a mis en relief que les vieilles habitudes, tous azimuts,
se transformeront au profit du numérique. Par exemple l’enseignement dans
les amphis, les rassemblements dans les grandes salles, les interactions
commerciales changeront en mode digitale. Ce qui placera l’intelligence
artificielle au cœur de l’activité humaine. Alors, des investissements massifs
doivent administrés à l’avantage de ce secteur du fait de son rendement
stratégiques (les bases de données personnelles), et économique comme la
conjoncture économique mondiale le démontre éloquemment, attestée par
Americans for Tax Fairness et Institute for Policy Studies Program for
Inequality dans un rapport : au moment où l’économie mondiale s’effondre
touchant beaucoup de secteurs : l’industrie, l’habitat, tourisme, voyage… le
secteur numérique prospère. Par exemple les ultra-riches, aux Etats-Unis, au
nombre de (600) jouissent d’une croissance économique énorme estimée à $
434 milliards, soit une croissance de 15%. Notamment, les géants du monde
digital tels que Facebook de Mark Zuckerberg, Microsoft de Bill Gates,
Oracle Corporation de Larry Ellison et Warren Buffet, et Amazon de Jeff
Bezos. Donc, le sésame de la maîtrise du temps, dans le monde futur,
s’accroche au porte-clé digital. Par conséquent, les systèmes éducatifs doivent
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être orientés en ce sens, en mettant en place des infrastructures appropriées
pour ne pas rater le prochain train.
Quatrièmement – études prospectives et réponses adéquates à la
modernité :
Cette rubrique donne accès à l’« Ijtihād ». C’est-à-dire administrer des
efforts intellectuels pour apporter des réponses adéquates aux questions
d’ordre moderne tout en respectant les principes cardinaux de l’Islam. Ce qui
nécessite d’établir des centres et institutions de recherche portant sur des
sujets à caractère prospectif pour mieux se préparer les intempéries du futur.
Et cet aspect consiste en la genèse de cette réflexion servant à l’auteur une
estrade pour lancer un appel à tous les penseurs, savants et intellectuels à
l’échelle nationale et internationale pour s’intéresser aux éventuels
mécanismes de base dans l’objectif de mettre sur pied un système en charge
de ces question dans le domaine de la recherche : comités scientifiques et de
recherches étudiant tous les rapports et données relatifs au COVID-19, et les
changements, dans la sphère politiques, socio-économiques et médicales, qui
s’en découlent, ainsi que les textes de l’Islam pour apporter des solutions
appropriées.
Traduction : Cheikhouna Ndiaye